Quand on se promène en forêt, on est tout d’abord attiré par les éléments qui se situent à notre échelle. Comme les arbres, les oiseaux ou la grande faune. Rares sont ceux qui portent attention à ce qui se dissimule sous nos pieds. Et pourtant.
Hier, j’effectuais une balade en forêt, à la recherche de traces du passage des animaux. J’ai ainsi repéré des pistes de lièvres ou d’écureuils.
Mais ce qui a retenu plus particulièrement mon attention était beaucoup plus petit. Il s’agissait de traces des passages incessants laissées par une grande musaraigne (blarina brevicauda) entre son repère et une source de nourriture.


Il n’en fallait pas plus pour que j’établisse une stratégie pour obtenir des images de cet animal fascinant.
Un piège photo? Oui, j’ai déjà réussi à poser une grande musaraigne ainsi. Mais c’est très très très difficile d’obtenir des images réussies d’un animal si petit à l’aide de cette méthode.
Pendant que je songeais à ma stratégie, j’ai vu le bout du museau de la musaraigne apparaître à l’entrée de son repaire. Elle était active de jour, même si c’est plutôt un animal nocturne. Le plus simple était donc d’installer un objectif macro sur ma caméra et de tenter de prendre l’animal la caméra bien en main.
Cela s’est aussi avéré un défi.
Contrairement à la majorité des insectes qui se déplacent plutôt lentement, ce qui laisse le temps voulu pour bien placer le focus, la grande musaraigne, elle, est un animal nerveux. Quand elle sort de son terrier pour mieux se diriger vers une source de nourriture, elle le fait en courant et en remuant constamment. De quoi mettre la patience du macrophotographe à rude épreuve.
Cette vidéo, mal réalisée j’en conviens, donne une idée de la difficulté que tout cela représente.
Il faut dire que la vie de la grande musaraigne en est une à grands risques. Les prédateurs qui la ciblent peuvent aussi bien arriver des airs comme le grand-duc ou la chouette rayée, que se faufiler à travers les herbes comme la belette ou l’hermine, ou être aussi gros pour elle qu’un renard, un lynx, un raton-laveur ou une moufette.
À sa place, moi aussi je courrais très vite quand je me déplacerais à découvert! 🙂
Pour photographier la musaraigne, je me suis installé le plus simplement du monde. Bien assis dans la neige, sans remuer d’un poil, attendant qu’elle daigne sortir de son repaire pour que je la pose.
Il ne faisait hier pas très froid. Autour du point de congélation. Mais quand on reste assis immobile, c’est assez pour avoir froid rapidement. Heureusement, la musaraigne n’a pas mis de temps avant de s’activer. J’ai pu la photographier plusieurs fois.
J’ai tout d’abord tenté de le faire en lumière naturelle. Mais ça imposait de monter pas mal les ISO sur ma caméra ; quelque comme comme ISO 1250, voire ISO 1600. En macro, la montée en ISO est moins pardonnable qu’en photographie régulière. Le piqué s’en ressent rapidement.



En lumière naturelle, par fin de journée, je ne parvenais pas à bien faire ressortir l’oeil minuscule de cet animal. Je me suis donc tourné vers le flash pour bien mettre en évidence ce détail inhérent à mon sujet.
Le flash rend les photos animalières un peu artificielles, je trouve. Mais parfois, il nous faut faire des compromis. Et je dois dire que je ne suis cette fois-ci pas mécontent du tout du résultat.

Si l’oeil de la grande musaraigne est si petit, c’est tout simplement parce qu’elle ne se sert pas vraiment de la vue afin de repérer sa nourriture. Cet animal se déplace plutôt à l’aide de l’écholocation. Elle émet de petits cris en se déplaçant dans le sous-bois, et c’est ce qui lui donne une bonne idée de son environnement immédiat.
Mais là n’est pas son unique caractère particulier. Ce petit soricidé est également venimeux. Si la grande musaraigne mord un petit rongeur comme une souris, son venin est assez puissant pour le paralyser. Elle peut ainsi conserver ses proies vivantes quelques jours. Une réserve de nourriture fraîche à portée de patte!
Pour l’humain, évidemment, il n’y a aucun risque. Il n’en demeure pas moins qu’une morsure de grande musaraigne est très douloureuse et peut provoquer des enflures.
À regarder sans toucher, donc…
Merci et nous faire découvrir des animaux de chez nous dont on ne connaît peu l’existence.
Ça fait plaisir 😊
Ah je ne la connaissais pas ! Merci pour ce partage !
On a plusieurs espèces de musaraignes au Québec. On a la musaraigne cendrée, la musaraigne pygmée, la musaraigne de Gaspésie, la musaraigne fuligineuse, la musaraigne nordique, la musaraigne longicaude, la musaraigne palustre et la grande musaraigne. Cette dernière est la seule qui soit venimeuse. Et elle peut aussi manger les autres espèces de musaraignes.