Dans la région de Montréal, quand on parle d’une espèce menacée, il est plus souvent qu’autrement question de la rainette faux-grillon. Les populations de ce petit amphibien sont en recul constant, principalement à cause de la destruction de ses habitats, et c’est pour cette raison que bien des gens en parlent et tentent de renverser la tendance en sa faveur.
Le port de Contrecoeur, qui serait construit dans l’un de ses derniers habitats sensibles, nous pousse aussi à parler parfois du chevalier cuivré, la seule espèce endémique du Québec.
Mais parallèlement à ces dossiers, il demeure très rare qu’on obtienne des informations sur une espèce très discrète qui ne se retrouve que dans la région de Montréal et qui est elle aussi menacée. Et je parle cette fois de la couleuvre brune (Storeria dekayi).

On dit que la couleuvre brune est la plus urbaine de nos couleuvres. Et pour cause, elle se retrouve essentiellement à Montréal, sur des terrains défrichés, souvent près de cours d’eau. Ce qui correspond pas mal aux parcs urbains de la région de Montréal. C’est une espèce qui se déplace peu et qui évite de traverser les routes. Ces dernières la briment donc dans son occupation du territoire.
La couleuvre brune est toute petite. Elle mesure moins de 35 centimètres. Elle consomme des limaces, des vers, des escargots qu’elle chasse à l’olfaction, surtout le soir et la nuit.

La rainette faux-grillon bénéficie elle d’un suivi serré. D’année en année, des bénévoles parcourent les marais afin de constater l’état de ses populations. Alors que des militants ne ménagent aucun effort afin de la défendre auprès des instances gouvernementales et municipales. Bref, il y a un combat qui est mené afin de protéger cette espèce.

Mais ce n’est pas du tout le cas de la couleuvre brune, espèce menacée qui souffre des mêmes problèmes que la faux-grillon et qui s’appellent la destruction de ses habitats à grands coups d’étalement urbain.
Mais personne n’assure de véritables suivis sur l’état de ses populations.
Il y a deux ans, j’ai eu la chance d’être guidé par des biologistes sur la piste de la couleuvre brune. Cela se passait dans le parc des Îles-de-Boucherville. J’ai alors eu la chance d’observer ce petit reptile très discret. Les individus que j’ai aperçus étaient dissimulés sous des bardeaux d’asphalte que les biologistes utilisaient afin de les regrouper et avoir ainsi une meilleure idée de sa présence dans les limites de ce parc très urbain. (les bardeaux chauffent au soleil et attirent les reptiles, animaux à sang froid).
Mais au-delà du parc des Îles-de-Boucherville, qu’en est-il? Où peut-on trouver cette couleuvre?
Les experts de l’Ecomuseum, à Montréal, s’intéressent eux aussi au sort de cet animal. Ils précisent qu’en 10 ans seulement, 21% de ses habitats ont été détruits. Ce qui n’est pas une bonne nouvelle, bien évidemment.
Afin de renverser la vapeur, les biologistes de ce zoo ont lancé un programme de protection de la couleuvre brune. Entre 2016 et 2018, ils ont aménagé sept zones protégées pour cette couleuvre. Ces aires se trouvent aux endroits suivants : les parcs-nature du Bois-de-l’Île-Bizard, du Bois-de-Liesse et de la Pointe-aux-Prairies en phase 1, puis le parc-nature de l’Île-de-la-Visitation, le refuge faunique de Deux-Montagnes et le parc national des Îles-de-Boucherville en phase 2.
En tout, on parle de 45 hectares qui ont été aménagés afin de venir en aide à cette couleuvre.
Le zoo Ecomuseum a aussi produit une capsule afin de mieux faire connaître cette espèce.
Mais depuis 2018, est-ce que quelque chose de déterminant a été fait en faveur de la couleuvre brune? Est-ce que des projets domiciliaires ou autres ont été arrêtés afin de ne pas détruire de nouveaux habitats de ce reptile très timide? Bonne question!
Les biologistes assurent que la présence de la couleuvre brune était importante dans la région de Montréal au tournant des années 1950. Ce qui n’est aujourd’hui plus le cas. Mais ils ne peuvent en dire davantage car aucune étude n’a été réalisée afin de mesurer la taille des populations québécoises de couleuvres brunes.
En 2022, le gouvernement du Québec a enfin mis à jour la liste des espèces menacées du Québec. Et c’est à cette occasion que la couleuvre brune a été ajoutée à la liste.
Ça demeure bien peu. Je ne peux qualifier autrement la chose.