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Les milieux humides sont gérés n’importe comment au Québec

Pas besoin d’avoir la tête à Papineau pour s’en rendre compte. Il s’agit de s’intéresser le moindrement à la situation des milieux humides au Québec pour s’apercevoir que c’est un foutoir qui est tout à l’avantage des promoteurs et autres délinquants de l’immobilier.

Dans la grande région de Montréal, je ne sais même plus quel est le pourcentage des milieux humides qui ont été détruits au fil des ans. Il y a 10 ans, on parlait de 85% de ces habitats qui avaient été remblayés. En 2023, on doit approcher des 90%. C’est dramatique!

C’est en tout cas ce que j’en déduis après la lecture d’un reportage diffusé par Radio-Canada et qui présente le rapport de la commissaire au développement durable, Janique Lambert.

Grosso modo, cette dernière explique dans son document que la loi adoptée par Québec en 2017 afin de stopper enfin la destruction des milieux humides est au mieux mal appliquée, voire pas du tout. Ce qui explique que les milieux humides sont encore détruits à un rythme trop important en 2023 pour que ça soit rassurant.

Dans un monde idéal, le ministère de l’Environnement souhaite que les projets qui lui sont soumis évitent de détruire les milieux humides. C’est la première intervention du ministère. Et c’est aussi très logique. Le promoteur peut quand même justifier la destruction en affirmant clairement que son projet ne peut être réalisé à un autre endroit que celui-là. Tel que stipulé dans le rapport, le ministère de l’Environnement a approuvé 70% des demandes qui lui ont été soumises et qui comprenaient la destruction d’un milieu humide sans même vérifier s’il n’était pas possible de faire le projet ailleurs qu’à cet endroit. C’est ridicule!

Étant donné que la très vaste majorité des projets acceptés par le ministère ces impactent un milieu humide, le promoteur doit produire dans un tel cas un document qui explique comment il s’y prendra pour réaliser des travaux avec le moins de dommages possible sur l’environnement. Or, le ministère ne prend même pas la peine d’inspecter ces chantiers.

Et même lorsqu’un inspecteur fait son travail, le ministère n’a aucun moyen de s’assurer que ses recommandations sont suivies. Il faut dire que les rares inspections qui sont réalisées se font à distance. À distance? Pardon! J’ai sûrement mal lu…Mais non, c’est vraiment cela qui est écrit dans l’article. Comment voulez-vous réaliser une inspection digne de ce nom si vous restez assis dans votre bureau!? C’est vraiment n’importe quoi!

« La majorité des autorisations ministérielles délivrées pour des travaux en milieux humides et hydriques au cours des 10 dernières années n’ont fait l’objet d’aucune inspection de conformité. »

Janique Lambert (Radio-Canada)

Après ça, on s’étonne que les promoteurs agissent comme bon leur semble, loi ou pas. Il n’y a personne pour les surveiller. Alors c’est le Far-West!

Ça me rappelle d’ailleurs le cas de Shathony à Longueuil, compagnie qui a détruit un milieu humide qui abritait des rainettes faux-grillons il y a quelques années de cela maintenant. Shathony n’avait même pas obtenu l’aval de qui que ce soit avant de procéder. Si on n’avait fait de plaintes, je ne suis même pas certain que ce promoteur aurait eu des problèmes. Or, ça fait 2 ans tout ça, et l’enquête nous dit-on suit toujours son cours…Pendant ce temps-là, ce milieu humide-là n’est pas restauré, tel que cela avait pourtant été exigé.

Et je ne vous parle pas des amendes ridicules que Shathony a récoltées après avoir illégalement détruit un milieu humide. Ça donne juste envie de pleurer.

Le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec estime qu’il faudrait augmenter drastiquement le nombre d’inspecteurs au Québec afin d’éviter que des situations comme celle-là se reproduisent. Ce serait en effet la moindre des choses. Mais au Québec, on semble croire que 260 inspecteurs en environnement, c’est suffisant pour gérer les chantiers qui menacent les milieux humides. Comme on semble penser que 4-5 agents de la faune peuvent empêcher le braconnage sur des territoires presque aussi grands que des pays.

C’est franchement n’importe quoi!

Le rapport critique également la stratégie de compensation imposée par le ministère de l’Environnement. Ça, ça veut dire que si tu as la permission de détruire un milieu humide, tu dois en contrepartie financer le Fonds de protection de l’environnement et du domaine hydrique de l’État. Par la suite, ce fonds financera des initiatives de restauration et de création de milieux humides. Ou dit plus clairement, l’argent doit servir à créer un autre milieu humide plus loin. Ou en restaurer un autre, ailleurs. Si cette stratégie peut sembler logique, dans les faits, c’est un peu n’importe quoi. Tout le monde conviendra qu’il est extrêmement difficile, voire impossible, de recréer artificiellement ce que la nature a inventé et que le ministère laisse détruire par les promoteurs.

Le pire, c’est que même ça, c’est trop demander. Je veux dire par là que les mesures compensatoires ne voient à peu près jamais le jour. Pourquoi? Parce qu’il en coûte beaucoup plus pour créer ou restaurer un milieu humide que ce que l’État accorde en argent pour le faire. Résultat: on détruit à tout vent et on a des pertes nettes en termes de milieux humides. Le bilan du Québec en environnement est franchement honteux.

C’est probablement pour ça que les Municipalités régionales de comté (MRC) ne se donnent même plus la peine de produire de plans de compensation pour les milieux humides détruits. Le rapport de Mme Lambert souligne en effet que 70 MRC où des milieux humides ont été détruits en 2017 et 2018 n’ont même jamais produit de plans de restauration des milieux humides massacrés. C’est pourtant une mesure phare de la loi sur la protection des milieux humides. Mais bon, qui s’en soucie!

Après ça, on s’étonne qu’on perd chaque année un peu plus de ces milieux humides qui sont pourtant d’une importance considérable. Ils abritent une riche biodiversité, ils filtrent les eaux et contribuent à amoindrir les risques d’inondation.

Enfin. C’est vraiment enrageant tout ça!

Si le coeur vous en dit et que vous voulez plus de détails par rapport à tout ça, je vous conseille de lire l’article de Radio-Canada: cliquez ici.

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