Faire face à de bien grandes dents


Pour réussir des photos de certaines espèces, sous l’eau, il faut sortir des sentiers battus.

Ce jour-là, j’avais repéré un beau gros loup Atlantique au fond de son repaire. Jusque-là, rien de bien spécial. Car même si ce poisson possède un statut menacé dans le Saint-Laurent, il se trouve que je l’observe quand même souvent lors de mes plongées dans le secteur de Baie-Comeau.

Ce qui rendait cette nouvelle rencontre très spéciale, c’est que le poisson – qui peut mesurer plus d’un mètre et demi – protégeait ses oeufs.

Chez le loup Atlantique, c’est le mâle qui veille sur les oeufs. Ces oeufs figurent parmi les plus gros que pondent les espèces de poissons.

Je voulais absolument des images de cette scène. Le problème était que le loup était caché profondément dans son antre.

Je décidai donc de réaménager la configuration de ma caméra pour que je puisse la glisser dans le trou. Pour ce faire, je détachai les deux lampes qui trônaient au bout de deux grands bras. Je pris l’une d’elles dans mes mains, et c’est de cette façon que je décidai d’éclairer la scène.

Il ne me restait plus qu’à me glisser entre les rochers pour m’approcher suffisamment du loup. Avec une bouteille sur le dos, ça se raconte plus facilement que ça ne se fait, je vous le garantis. Quoi qu’il en soit, j’étais bien décidé à réussir. Je fis signe au plongeur qui m’accompagnait que j’allais entrer dans le trou. Il me regarda avec un air qui était facile à décoder: il ne semblait pas trouver que c’était l’idée du siècle 😉

Je me contorsionnai quand même, me glissai entre les roches et parvins à arriver suffisamment près du loup pour faire des photos.

J’étais tellement proche que je voyais très clairement les grandes dents de l’animal, là, juste devant moi. De toutes mes rencontres avec ce poisson, jamais je n’ai senti la moindre agressivité chez lui. Mais avec des oeufs à protéger, serait-ce toujours le cas? J’étais désormais bien placé pour le découvrir. Et si je devais rencontrer cette fois un poisson avec une nouvelle attitude – c’est-à-dire désireux d’user de ses dents pour me faire sortir de SA cachette – j’aurais été bien mal pris. Jamais je n’aurais pu sortir assez rapidement pour fuir le poisson. Et j’avais entendu suffisamment d’histoires de pêcheurs concernant ce loup qui pouvait mordre une rame ou des pièces du bateau pour savoir que la morsure aurait été désagréable, d’autant que c’était mon visage qui lui était accessible 😉

Le loup Atlantique a vraiment une mâchoire de béton. Ce poisson se nourrit de crabes et même d’oursins. Il a des genres de canines proéminentes pour saisir ses proies. Et des dents sur le palais pour bien les broyer. C’est d’ailleurs grâce aux carcasses de crustacés devant les trous entre les roches que je trouve cette espèce. Quand il y a des carcasses, je sais qu’un loup est caché dans le secteur, et je me mets à chercher.

Toutes ces infos me revenaient à l’esprit alors que je faisais mes photos, dans le trou du loup.

Heureusement, ce beau gros mâle est demeuré aussi placide et gentil que les autres loups que j’avais jusque-là rencontrés lors de mes plongées. Il m’a fixé perxplexe, mais n’a jamais tenté de me faire reculer.

Pour le remercier de sa gentillesse, je quittai prestement les lieux. Mes photos étaient faites, et je voulais le déranger le moins longtemps possible.

Je ressortis du trou et fis signe au plongeur qui m’accompagnait que tout s’était très bien passé. On pouvait poursuivre nos explorations des profondeurs glacées de l’estuaire du Saint-Laurent…

#tourismecotenord#saintlaurentfleuve#photoanimalière#photonaturelover

Une réponse à « Faire face à de bien grandes dents »

  1. Magnifique

    J’aime

Répondre à Anonyme Annuler la réponse.